Que sont les cauchemars ?
Alexandre Lemyre, M.A., Ph.D.
J'ai étudié la psychologie à l'Université Laval, Canada, où j'ai obtenu un baccalauréat, une maîtrise et un doctorat. Je suis un chercheur en psychologie, pas un psychologue (je ne suis pas accrédité pour faire de la psychothérapie). Ma thèse doctorale consistait à développer et tester une nouvelle théorie de la fonction des rêves. Au cours de mes études, j'ai également travaillé sur plusieurs projets de recherche en lien avec les rêves, les cauchemars, l'insomnie, l'anxiété et la consommation de substances. Depuis août 2021, je suis stagiaire postdoctorale au Centre d'Études sur le Trauma (CÉT), qui fait partie du Centre de recherche de l'Institut Universitaire de Santé Mentale de Montréal (IUSMM). J'y étudie les conséquences de l’exposition à la violence chez les travailleurs sociaux, les déterminants des troubles du sommeil (cauchemars et insomnie) à la suite d’un traumatisme, ainsi que le traitement des cauchemars chroniques. J'ai un intérêt particulier pour l'utilisation des technologies (p.ex., applications mobiles) pour le traitement des difficultés psychologiques.
Le contenu de cet article a été mis à jour le 1er février 2022.
Introduction
Jusqu’au début de ma vingtaine, les cauchemars ont été un thème omniprésent dans ma vie. De mon enfance, à mon adolescence, jusqu’à mes premières années à l’université, j’ai eu des épisodes où j’ai fait des cauchemars assez fréquemment. En fait, j’ai choisi de faire ma thèse doctorale sur le thème des rêves en grande partie à cause d’un moment Eureka ! après m’être réveillé d’un cauchemar au milieu de la nuit. À ce moment, j’ai cru avoir trouvé la raison pour laquelle nous faisons des cauchemars (pour en savoir plus à ce sujet, voir un autre article sur les modèles théoriques expliquant les cauchemars) ! Au cours de mes études à la maîtrise et au doctorat, j’ai eu l’occasion de mener plusieurs études sur les rêves et les cauchemars. Dans le présent article, j’aimerais vous aider à élucider ce que sont exactement les cauchemars. Naturellement, la nature des cauchemars peut varier d’une nuit à l’autre, et d’une personne à l’autre. Néanmoins, certaines caractéristiques des cauchemars méritent d’être explorées.
La définition des cauchemars
L’Association Américaine de Psychiatrie (2013, version française, p. 523) définit les cauchemars comme « des rêves prolongés, extrêmement dysphoriques, dont le souvenir persiste lors de l’éveil, qui impliquent généralement des efforts pour éviter des menaces contre la survie, la sécurité ou l’intégrité physique ». Les cauchemars ne doivent pas être confondus avec les terreurs nocturnes, qui sont définies comme des « réveils brutaux et terrifiants, débutant habituellement par un cri d’effroi » (American Psychiatric Association, 2013, version française, p. 517). Selon l’Association Américaine de Psychiatrie (2013, version française, pp. 525-526), il existe au moins trois différences principales entre les cauchemars et les terreurs nocturnes :
1) Les cauchemars surviennent généralement pendant la deuxième moitié de la nuit, alors que les terreurs nocturnes surviennent généralement pendant la première moitié de la nuit. En effet, la plupart des cauchemars (et des rêves) se produisent pendant le sommeil paradoxal (REM sleep), qui est le plus prédominant dans la deuxième moitié de la nuit. À l’inverse, les terreurs nocturnes surviennent depuis le sommeil non paradoxal (en particulier le sommeil profond, également appelé « sommeil à ondes lentes » ou « stade 3 du sommeil »), qui est le plus prédominant dans la première moitié de la nuit (Carskadon et Dement, 2005; Nielsen, 2000).
2) Les cauchemars sont bien remémorés au réveil, alors que les terreurs nocturnes ne s’accompagnent pas d’un souvenir clair d’un rêve (s’il y a un tel souvenir, il est très vague). En fait, après une terreur nocturne, il est commun que la personne ne se réveille pas complètement. Dans ces cas, elle se rendort et ne garde généralement souvent aucun souvenir de l’épisode de terreur nocturne après son réveil le matin.
3) Après un cauchemar, l’individu est rapidement orienté et pleinement éveillé. Au contraire, lors d’une terreur nocturne, l’individu est dans un état d’éveil incomplet. La personne n’est pas complètement orientée dans son environnement et ne répond généralement pas lorsque d’autres gens tentent d’interagir avec elle.
La prévalence des cauchemars
Le terme « prévalence » fait référence à la proportion d’une population donnée (p.ex., les enfants, les adolescents ou les adultes) qui est affectée par une condition spécifique, dans ce cas-ci, les cauchemars. Une revue de la documentation scientifique s’est concentrée sur la prévalence des cauchemars chez les enfants et les adolescents (Gauchat et al., 2014). Étant donné que les études publiées sur ce sujet rapportent des estimations qui varient considérablement, il est impossible de rapporter des chiffres exacts. Néanmoins, dans la plupart des études, environ 40% à 60% des enfants âgés de 5 à 10 ans font des cauchemars au moins à l’occasion, et des estimations similaires ont été obtenues pour les enfants et les adolescents âgés de 10 à 18 ans. La prévalence des cauchemars hebdomadaires dans ces deux tranches d’âge varie entre 3% et 12% dans la plupart des études (Gauchat et al., 2014).
Dans la population adulte, environ 2% à 5% des individus ont au moins un cauchemar par semaine (Sandman et al., 2013; Schredl, 2013). Cependant, les adultes ayant un trouble de santé mentale sont beaucoup plus susceptibles de présenter cette difficulté de sommeil (Lemyre et al., 2019). Dans la meilleure étude sur les cauchemars chez les adultes ayant un trouble mental (van Schagen et al., 2017), le pourcentage d’individus ayant vécu au moins un cauchemar par semaine était de 31% pour les troubles de la personnalité, 37% pour les troubles de l’humeur (dont la dépression ), 16% pour le trouble anxieux (p.ex., phobies, trouble panique, trouble d’anxiété généralisée) et 67% pour le trouble de stress post-traumatique.
D’après une méta-analyse de 98 échantillons d’individus en bonne santé (c.-à-d., des individus qui n’ont pas été sélectionnés en raison de la présence d’un trouble mental; Schredl et Reinhard, 2011), les femmes ont tendance à faire plus de cauchemars que les hommes dans trois groupes d’âge : les adolescents (10-17 ans), les jeunes adultes (18-29 ans) et les adultes d’âge moyen (30-59 ans); cette différence entre les sexes n’est pas présente pour les enfants (10 ans ou moins) ou les adultes plus âgés (60 ans ou plus). D’après une analyse de 7 échantillons d’individus en bonne santé composés principalement d’adolescents et de jeunes adultes, les femmes ressentent également plus de détresse diurne en réaction à leurs cauchemars comparativement aux hommes (Schredl et Reinhard, 2011).
Distinction entre les cauchemars idiopathiques et les cauchemars post-traumatiques
Les cauchemars peuvent être divisés en deux types : les cauchemars idiopathiques et les cauchemars post-traumatiques. Les cauchemars idiopathiques ne sont pas liés de manière évidente à un traumatisme passé. Il est question de cauchemars post-traumatiques lorsque le contenu ou l’émotion principale du cauchemar sont liés à un traumatisme passé (Spoormaker et Montgomery, 2008). Selon une étude représentative de la population adulte aux États-Unis, 68% des individus qui développent un trouble de stress post-traumatique suite à une expérience traumatisante souffrent de cauchemars post-traumatiques (Milanak et al., 2019).
Les cauchemars post-traumatiques réplicatifs sont généralement considérés comme la forme la plus sévère de cauchemars. Ces cauchemars « rejouent » un traumatisme passé, comme si la personne vivait ce trauma pour la première fois (Levin et Nielsen, 2007). Cependant, une analyse minutieuse des cauchemars post-traumatiques réplicatifs montre qu’il semble toujours y avoir au moins une différence notable entre le cauchemar post-traumatique réplicatif et le traumatisme qui a été vécu (Hartmann, 2010). Donc, ces cauchemars ne seraient jamais parfaitement « réplicatifs ».
Distinguer les cauchemars et les mauvais rêves
Nous différencions parfois les cauchemars des mauvais rêves en fonction d’un critère de « réveil ». Plus précisément, les cauchemars sont définis comme des rêves hautement dysphoriques (c.-à-d., très désagréables) qui déclenchent l’éveil, tandis que les mauvais rêves sont définis comme des rêves hautement dysphoriques qui ne déclenchent pas l’éveil. Cette distinction a un certain attrait, car les gens peuvent généralement dire avec une grande confiance si un rêve dysphorique les a réveillés ou non (Blagrove et Haywood, 2006). En pratique, cependant, cette distinction est rarement utilisée. Dans la documentation scientifique sur les rêves, lorsque le terme « cauchemar » est utilisé, il englobe généralement tous les rêves hautement dysphoriques, que ceux-ci réveillent ou non la personne.
L'intensité émotionnelle des cauchemars et des mauvais rêves
Zadra et al. (2006) ont mené une étude sur les émotions dans les cauchemars et les mauvais rêves. L’échantillon de l’étude était composé de 90 étudiants universitaires. Les participants ont rempli un journal de rêve pendant une période de quatre semaines dans lequel ils ont rapporté leurs cauchemars et mauvais rêves (distingués sur la base du critère de réveil). Ils ont évalué l’intensité émotionnelle de chaque cauchemar et mauvais rêve sur une échelle en neuf points allant de « très faible » (1) à « très intense » (9). L’intensité émotionnelle moyenne pour les cauchemars était de 7,95, alors que l’intensité émotionnelle moyenne pour les mauvais rêves était de 7,24 (pour les participants qui avaient vécu au moins un cauchemar et un mauvais rêve) ou de 7,06 (pour les participants qui avaient fait au moins un mauvais rêve, mais aucun cauchemar). Ces chiffres montrent qu’en moyenne, les cauchemars étaient légèrement plus intenses émotionnellement que les mauvais rêves. Néanmoins, environ 46% à 47% des mauvais rêves avaient une intensité émotionnelle égale ou supérieure à l’intensité émotionnelle moyenne des cauchemars. En d’autres termes, près de la moitié de tous les mauvais rêves étaient au moins aussi intenses qu’un cauchemar moyen (Zadra et al., 2006).
Dans une autre étude, Robert et Zadra (2014) ont analysé 253 cauchemars et 431 mauvais rêves rapportés par 331 étudiants de premier cycle. Les participants ont tenu un journal de rêve pendant deux à cinq semaines dans lequel ils ont rapporté leurs cauchemars et mauvais rêves (distingués sur la base du critère de réveil). Ils ont évalué l’intensité émotionnelle de chaque cauchemar et mauvais rêve sur une échelle de cinq points. L’intensité émotionnelle moyenne des cauchemars était de 4,36, tandis que l’intensité émotionnelle moyenne des mauvais rêves était de 3,48 (Robert et Zadra, 2014). En résumé, les cauchemars et les mauvais rêves sont perçus comme ayant une intensité émotionnelle élevée (ce qui n’est pas surprenant), et les cauchemars sont en moyenne plus intenses émotionnellement que les mauvais rêves.
La nature des émotions dans les cauchemars et les mauvais rêves
Les deux études présentées dans la section précédente (Robert et Zadra, 2014; Zadra et al., 2006) ont également analysé la nature des principales émotions ressenties dans les cauchemars et les mauvais rêves. Ci-dessous, je présente la proportion de cauchemars et de mauvais rêves qui contiennent chaque émotion comme émotion principale (le symbole « ~ » signifie « environ ») :
Peur
70% des cauchemars, ~52% des mauvais rêves (Zadra et al., 2006)
65% des cauchemars, 45% des mauvais rêves (Robert et Zadra, 2014)
Frustration
7% des cauchemars, ~6% des mauvais rêves (Zadra et al., 2006)
3% des cauchemars, 4% des mauvais rêves (Robert et Zadra, 2014)
Colère
6% des cauchemars, ~8% des mauvais rêves (Zadra et al., 2006)
5% des cauchemars, 7% des mauvais rêves (Robert et Zadra, 2014)
Culpabilité
5% des cauchemars, ~1% des mauvais rêves (Zadra et al., 2006)
2% des cauchemars, 4% des mauvais rêves (Robert et Zadra, 2014)
Tristesse
3% des cauchemars, ~10% des mauvais rêves (Zadra et al., 2006)
7% des cauchemars, 12% des mauvais rêves (Robert et Zadra, 2014)
Confusion
1% des cauchemars, ~5% des mauvais rêves (Zadra et al., 2006)
3% des cauchemars, 7% des mauvais rêves (Robert et Zadra, 2014)
Dégoût
0% des cauchemars, ~3% des mauvais rêves (Zadra et al., 2006)
3% des cauchemars, 5% des mauvais rêves (Robert et Zadra, 2014)
Émotions positives (en raison d’une fin positive dans le cauchemar ou le mauvais rêve)
Cette catégorie n’a pas été utilisée dans l’étude de Zadra et al. (2006)
4% des cauchemars, 4% des mauvais rêves (Robert et Zadra, 2014)
Autres émotions
8% des cauchemars, ~14% des mauvais rêves (Zadra et al., 2006)
9% des cauchemars, 12% des mauvais rêves (Robert et Zadra, 2014)
Thèmes des cauchemars et des mauvais rêves
Dans l’étude de Robert et Zadra (2014) que j’ai décrite ci-dessus, les auteurs ont construit une liste de 12 thèmes de cauchemars à partir de la documentation scientifique. Ils ont utilisé ces thèmes pour catégoriser 253 cauchemars et 431 mauvais rêves. Le pourcentage de cauchemars et de mauvais rêves contenant chaque thème est présenté ci-dessous (le même cauchemar ou mauvais rêve pouvait contenir plus d’un thème) :
- Agression physique (49% des cauchemars, 21% des mauvais rêves)
- Conflits interpersonnels (21% des cauchemars, 35% des mauvais rêves)
- Échec ou impuissance (16% des cauchemars, 18% des mauvais rêves)
- Préoccupations liées à la santé et décès (9% des cauchemars, 14% des mauvais rêves)
- Appréhension/inquiétude (9% des cauchemars, 14% des mauvais rêves)
- Être poursuivi (11% des cauchemars, 6% des mauvais rêves)
- Force maléfique (11% des cauchemars, 5% des mauvais rêves)
- Accidents (9% des cauchemars, 5% des mauvais rêves)
- Désastre ou calamité (6% des cauchemars, 6% des mauvais rêves)
- Insectes (7% des cauchemars, 4% des mauvais rêves)
- Anomalie environnementale (5% des cauchemars, 4% des mauvais rêves)
- Autres thèmes (7% des cauchemars, 10% des mauvais rêves)
La source des dangers et les réponses du rêveur dans les cauchemars et les mauvais rêves provoquant la peur
Dans une autre étude, McNamara et al. (2015) ont sélectionné 436 cauchemars et mauvais rêves produisant de la peur (c.-à-d., des cauchemars et des mauvais rêves dans lesquels le rêveur éprouve de la peur) parmi une énorme base de données comprenant 49 000 rapports de rêves. Les sources d danger dans ces cauchemars et mauvais rêves étaient les suivantes :
- Environnement ou circonstances (38%)
- Homme inconnu (17%)
- Agent surnaturel (p.ex., fantôme ou démon, 12%)
- Peste ou animal (10%)
- Homme familier (5%)
- Femme inconnue (2%)
- Femme familière (2%)
- Non spécifié (15%)
Dans ces cauchemars, le rêveur s’enfuyait, se cachait ou se sentait simplement pris au piège et impuissant; rarement, le rêveur a combattu la menace (McNamara et al., 2015).
Cauchemars dans lesquels le rêveur est l'agresseur
Mathes et al. (2018) rapportent les résultats de deux études portant sur un type de cauchemars dont on entend rarement parler : les cauchemars dans lesquelles le rêveur est l’agresseur. Dans la première étude, 39 participants qui avaient au moins un cauchemar par mois ont tenu un journal des rêves pendant 28 jours. Au cours de cette période, un total de 145 cauchemars ont été rapportés. Selon l’évaluation des participants, le rêveur était un agresseur dans 26 cauchemars (représentant 18% de tous les cauchemars) et une victime dans 49 cauchemars; les autres 70 cauchemars ne pouvaient pas être clairement classés dans ces deux catégories. Les actions agressives étaient accidentelles pour seulement trois des 26 cauchemars dans lesquels le rêveur était l’agresseur; dans les 23 autres cauchemars, les gestes agressifs consistaient à tuer un personnage (12 cauchemars), blesser un personnage (8 cauchemars) ou attaquer verbalement un personnage (3 cauchemars). Dans la deuxième étude, 60 participants qui avaient au moins un cauchemar par mois ont rempli un journal de rêves pendant 28 jours. Durant cette période, 17 d’entre eux (28% de l’échantillon) ont fait au moins un cauchemar dans lequel ils étaient l’agresseur (Mathes et al., 2018).
Activité physiologique du dormeur pendant les cauchemars
À l’état d’éveil, lorsque nous avons peur, tout notre corps réagit, et ces réponses sont régulées (en grande partie de manière incontrôlable) par le système nerveux autonome. Le corps endormi réagit-il de la même manière lorsque la peur est déclenchée par un cauchemar ? C’est une question à laquelle il est difficile de répondre, car mesurer l’activation du système nerveux autonome est traditionnellement effectué en laboratoire et les cauchemars sont difficiles à étudier dans ce contexte (pour des raisons qui nous échappent encore, les personnes ont rarement des cauchemars lorsqu’ils dorment dans un laboratoire de sommeil).
À ma connaissance, une seule étude a évalué de manière satisfaisante l’activation du système nerveux autonome lors d’épisodes de cauchemars (Paul et al., 2019). Les auteurs de cette étude ont utilisé une méthode de polysomnographie ambulatoire. Cela leur a permis de mesurer l’activité du système nerveux autonome chez 19 individus souffrant de cauchemars et 19 bons dormeurs pendant qu’ils dormaient à la maison pendant trois nuits. Les bons dormeurs ont rapporté 74 rapports de rêves, tandis que les personnes souffrant de cauchemars ont rapporté 70 rapports de rêves et 13 rapports de cauchemars. Pour les analyses, les auteurs ont considéré l’activité du système nerveux autonome au cours des cinq dernières minutes de sommeil paradoxal avant le réveil d’un rêve ou d’un cauchemar. Plusieurs mesures (p.ex., mesures électrodermiques, fréquence cardiaque, durée du cycle respiratoire) ont montré que les cauchemars s’accompagnent d’une activité accrue du système nerveux autonome par rapport aux rêves normaux. Cela était apparent dans une plus grande mesure en comparant les cauchemars et les rêves normaux des personnes souffrant de cauchemars, et dans une moindre mesure en comparant les cauchemars des personnes souffrant de cauchemars et les rêves normaux des bons dormeurs (Paul et al., 2019). Ces résultats suggèrent que les fortes émotions négatives (en particulier, la peur) dans les cauchemars s’accompagnent d’une augmentation de l’activité du système nerveux autonome chez le dormeur.
Sommaire et conclusion
En résumé, les cauchemars sont des rêves prolongés, extrêmement dysphoriques, dont le souvenir persiste lors de l’éveil. Il ne faut pas les confondre avec les terreurs nocturnes, qui constituent un tout autre phénomène. Les cauchemars peuvent survenir à tout âge, de l’enfance à l’adolescence, ainsi qu’à l’âge adulte. Les femmes vivent généralement plus de cauchemars que les hommes et rapportent plus de conséquences diurnes. Les cauchemars peuvent être divisés en deux types : les cauchemars post-traumatiques qui sont liés à une expérience traumatique passée, et les cauchemars idiopathiques, qui ne sont pas liés à une telle expérience. Les cauchemars post-traumatiques réplicatifs partagent une forte similitude avec le traumatisme passé, au point où nous dirons qu’ils « rejouent » ce traumatisme dans une large mesure. Les cauchemars peuvent également être différenciés des mauvais rêves sur la base d’un critère de réveil. Lorsque ce critère est utilisé, nous observons que les cauchemars sont un peu plus intenses émotionnellement que les mauvais rêves (en moyenne), en plus d’être plus susceptibles de contenir la peur comme émotion principale. Les cauchemars et les mauvais rêves peuvent présenter plusieurs thèmes, mais l’agression physique, les conflits interpersonnels et l’échec ou l’impuissance sont les plus courants. Dans les cauchemars qui produisent de la peur chez le rêveur, la source du danger est généralement une circonstance environnementale ou un homme inconnu. Dans ces cauchemars, le rêveur fuit, se cache ou se sent simplement impuissant ou pris au piège. Fait intéressant, le rêveur semble jouer le rôle de l’agresseur dans une proportion appréciable de cauchemars. Enfin, une étude a montré que les cauchemars vécus à la maison sont associés à une activation accrue du système nerveux autonome chez le dormeur. Dans l’ensemble, les cauchemars constituent un phénomène complexe qui peut prendre de nombreuses formes.
Références
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